28 août 2017
Voilà : encore une année scolaire finie ; une longue pause pyrénéenne, des lectures détendantes (romans) ou enrichissantes (biographie et prières d'Hildegarde de Bingen, mon choix spirituel pour cet été), des promenades en montagne, beaucoup, et en bord de mer, quelques jours ; la prière plus présente car plus de temps, moins de stress ; une courte session chrétienne en fin de vacances. Et plus l'été avance, de juillet à août, plus je me sens tendue vers l'année scolaire à venir, comme une flèche encore encochée, et que l'archer prépare avant de la lancer : je bricole les plans de séquences, me lance dans les œuvres que je ferai lire ou les textes que je voudrais faire étudier... A travers ces lectures et la façon dont j'envisage de les exploiter, je pense à mes futures classes, et je porte déjà en prière mes "futurs élèves" ; j'ai également en tête les projets artistiques, à lancer eux aussi.
Lancer, décoller ; voler ; l'été, c'est le tremplin avant le saut, la pause avant l'envol ! Je fais mes valises, je m'en vais, reviens, repars ...
Et pourtant, l'été c'est aussi la grande immobilité du temps suspendu, de l'oubli des contraintes horaires (plus d'emploi du temps rigide) et des sonneries (au revoir la sonnerie du lycée, bonjour les sonnailles des cloches des moutons et brebis, et le doux glouglou du gave sur les cailloux...) ; ce sont les repas à pas d'heure, les soirées qui s'étirent quand la pénombre envahit le vallon en contrebas du gîte, ou quand le soleil se couche sur la mer. Le spectacle de la nature amène paix, sérénité, et aspiration vers l'infini. La prière monte plus spontanément aux lèvres, l'âme s'élève toute seule, comme aspirée par les ascendants...
Une phrase entendue lors d'une conférence, « que ta rosée irrigue l'aridité de mon cœur », me parle, en ces quelques jours qui précèdent la rentrée, et je la tourne et retourne, (comme le rosé frais dans un verre, avant de le déguster par petites gorgées), tant elle me semble se prêter aux diverses pensées, aux sentiments variés qui me traversent :
• Sois ma rosée, Seigneur : viens, fidèlement et silencieusement au creux de la nuit, et chaque matin, m'irriguer de Ton Amour, même (et surtout) quand - prise dans les mini tourbillons du quotidien, les soucis, les heures qui défilent, les copies à corriger, les mille et une choses à faire avant de me coucher, ou la précipitation dès que je suis levée - j'ai oublié de prier, que j'ai oublié de remettre sous Ton regard le jardin de ma vie.
• Donne-moi de quoi me désaltérer, quand la sécheresse menace : parole sacrée, Ta Parole, que je ne fréquente pas toujours assez ; parole amie de quelqu'un du lycée, quand le découragement pointe ; écrits et paroles des "guides" que sont les saint-e-s, les penseurs et philosophes, les romanciers, chrétiens ou pas, mais qui parlent de Toi.
• Aide-moi à donner soif à mes élèves et aussi à les désaltérer ;
pas que de littérature, de grands textes et de culture ; même si, professeure de français, c'est là une de mes tâches, que je ne renie pas, bien au contraire ; même si je me sens parfois si démunie pour "donner à boire" à qui l'attend ; et à qui n'en a nulle envie, donc ! Mais à les abreuver aussi et surtout d'humain, de fraternité, de profondeur, de sens de la vie...
• Aide-moi à "faire fleurir" ces adolescents, à ne pas froisser, fouler, ou même ignorer, ces fleurs de ton jardin que tu me confies quelques heures par semaines pour un an. Car je sais que je ne peux pas compter que sur mes seules forces : je ne suis pas très patiente, à certaines heures de la journée, au fur et à mesure que les cours pompent mon énergie, ou à certains moments de l'année ; je "monte" vite (ton sec, remarques cinglantes ou ironiques, menaces pour rétablir l'ordre et le silence, là où parfois des encouragements calmes et fermes suffiraient...) ; je "redescends" tout aussi vite et ne suis pas rancunière, mais quand la "pique" a été lancée et a blessé, le mal est fait !
écouter : « Ubi caritas et amor, Deus ibi est » de Maurice Duruflé
C'est de Ton Amour dont j'aurai besoin, pour pallier les déficiences du mien ; Ton Amour, pour moi, m'irriguer, me faire tenir aux heures d'aridité, de sécheresse – Ton Amour pour eux, pour que tu m'en transmettes le feu, quand je ne les aimerai plus, que je glisserai vers la rancœur, la colère, les pensées négatives – l'amour que Tu as pour chacun de tes enfants, je voudrais tant qu'ils en captent au moins une étincelle, parfois, à travers ma personne et mes cours. Fais que je garde toujours au cœur ce désir, quand bien même il ne se réalise que rarement : mais la flèche jamais tendue n'a aucune chance d'atteindre le but !
Faire de belles séquences, oui, peaufiner le planning des cours et des devoirs, terminer le programme, soigner le Descriptif du bac, fignoler mes commentaires des textes... ; mais surtout : ne pas oublier d'aimer.