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samedi, 14 février 2015 00:00

De Jésus au Synode...

Écrit par

Une conférence de Mgr Daniel LABILLE, qui retrace brièvement l'histoire du mariage chrétien et les enjeux du Synode sur la famille.

 

Le mariage et la famille sont d’abord des réalités humaines ; les chrétiens depuis Jésus ont cependant une manière particulière des les vivre. Cette réalité aussi bien dans la société que dans l’Eglise se modifie ; les représentations que nos contemporains ont du mariage de la famille ont rapidement bougé.

Ce synode ne veut pas modifier la nature du mariage et de la famille pour les catholiques, mais il cherche comment mieux accompagner pastoralement des situations nouvelles.

 

  1. Le mariage depuis Jésus jusque Pie XI (Casti connubii).

Au départ le mariage des chrétiens s’est beaucoup inspiré du droit romain : chez les romains le mariage est une affaire familiale où par contrat un père donne sa fille à son futur gendre dont le but est de donner un père aux enfants de sa fille. Pour les chrétiens le contrat deviendra celui qui unit un homme et une femme dont le but est de légitimer les enfants. La fin du mariage, ce sont les enfants. Ce contrat entre chrétiens est indissoluble et oblige les époux à la fidélité ; l’adultère comme l’avortement seront dès le départ des péchés graves. (Mt 19, 6 ; 1 Co 7, 10-11). La femme n’a d’autre raison de se marier que d’être mère (S. Augustin). Le mariage a été introduit dans le septénaire sacramentaire au Moyen Age (S. Thomas au 13° siècle) et officialisé au Concile de Trente (XVI° siècle) : l’union des époux renvoie à l’alliance du Christ et de l’Eglise (Ep 5, 31-32)

Le mariage n’a pas fait l’objet d’une réflexion théologique approfondie ; il était d’abord une question de droit (l’union indissoluble et féconde d’un homme et d’une femme libres) et une question de morale : vivre la fidélité et la chasteté (la non-instrumentalisation du corps de l’autre). La vie religieuse est supérieure au mariage pour rencontrer Dieu. L’amour n’est pas déterminant dans le mariage.

En France, à partir de la révolution on distingue mariage civil et mariage religieux.

 

  1. Le mariage et la famille depuis le Concile Vatican II

Avec Pie XII et des mouvements de spiritualité conjugale, on s’oriente vers le mariage vécu comme une vocation. Vatican II approfondira cette intuition. Dans Lumen gentium, le chapitre 5 est consacré à la vocation de tous les baptisés à la sainteté et dans Gaudium et Spes (47-52) on présente la vie dans le mariage comme une des multiples formes d’accomplissement de l’amour dans les différents états de vie. Le mariage est alors défini comme une communauté de vie et d’amour entre un homme et une femme en vue d’accueillir des enfants. Ce qui souligne la place importante donnée à l’amour et à la charité conjugale entre les époux.

Le Synode sur la famille de 1980, en s’inspirant de la philosophie personnaliste fera de l’amour la vocation fondamentale de l’homme et dans le mariage, la sexualité sera une des expressions pour les époux du don total de l’un a l’autre. La charité conjugale est la forme de charité propre aux époux, comme la charité pastorale est la forme de charité propre aux pasteurs.

Entre le concile et le synode de 1980, est survenue l’encyclique « Humanae vitae » en 1968. Au cours du concile, le Pape Paul VI s’était réservé trois questions qui ne seraient pas mises en débat : le célibat des prêtres, l’exercice du ministère du pape, la régulation des naissances. Des commissions avaient été mises en route par Jean XXIII. Ce fut comme une marque de méfiance vis-à-vis des Pères conciliaires et ce qui entrainera pratiquement une non réception de ce texte qui préconisaient l’utilisation des méthodes naturelles pour la régulation des naissances, ce qui était la position la plus dure parmi les solutions proposées. Dans l’esprit même de beaucoup de catholiques cela décrédibilisera ce texte.

 

  1. Le synode de 2014-2015.

Pour le Pape François, il s’agit de faire synode c'est-à-dire faire route ensemble avec le peuple chrétien et écouter ses avis sur les joies et les difficultés de la famille et du mariage dans le monde d’aujourd’hui. Il ne s’agit pas de répéter ce que l’on sait déjà mais de discerner des chemins nouveaux pour vivre fidèlement, mais selon des modalités différentes le mariage et la famille, il s’agit de réfléchir à un accompagnement pastoral de la vocation au mariage.

Le discours d’introduction résumant toutes les contributions parvenues à Rome soulignait :

-          Comme toute vocation chrétienne le mariage est le lieu de la sanctification de celles et de ceux qui y sont engagés ; c’est une réalité à évangéliser et qui appelle à une conversion dont les modalités varient suivant les personnes et les situations.

-          Comme toute recherche du bien, elle demande un cheminement ; on ne peut pas être bon en tout tout de suite. Il ya des étapes pour comprendre et vivre l’état du mariage et la famille selon l’évangile.

-          Comment aussi gérer les échecs (qui sont mieux gérés chez les prêtres et les religieux) ; cela suppose : un changement de regard (qui suis-je pour juger ?), un changement de comportement (comment accueillir celui ou celle qui a échoué, quelle place à la miséricorde), un changement de compréhension de ce qu’est la communauté chrétienne (Il n’y a pas les parfaits et les autres, les justes et les pécheurs)

-          Comment être des communautés plus solidaires pour porter les fardeaux les uns des autres.

-          Comment gérer les situations nouvelles : les personnes homosexuelles, par exemple.

Il s’agit donc d’être attentif à ce que vivent concrètement les familles, faire la vérité en s’écoutant avec humilité sans crainte d’être jugé et inventer à partir de chaque situation un chemin qui assure à la fois la croissance de la personne et son intégration en communauté.

 

  1. D’un synode à l’autre.

Le synode est un lieu de débat comme l’avait été le concile et donc il est normal que des oppositions s’y manifestent. Il y aura toujours des gens pour dire « On a toujours fait et pensé comme cela », cela avec de bonnes raisons. Jésus a réinterprété la religion juive pour la mener à son accomplissement. Toutes proportions gardées, il y a un travail du même type à entreprendre pour rejoindre les personnes telles qu’elles se représentent leur couple et leur famille. Les propositions soumises au débat entre les deux synodes font état d’un certain nombre de défis pastoraux au sujet du mariage et de la famille. Elles sont résumées en 62 paragraphes dont certains sont encore à affiner (52, 53,55). D’autres questions sous-jacentes ont besoin d’être approfondies : par exemple, la loi de gradualité, la loi naturelle, les écoles de théologies personnaliste ou aristotélicienne, le lien entre eucharistie et mariage, le sensus fidei…). On peut retenir les questions suivantes :

-          Quels sont les signes de Dieu dans l’histoire des hommes d’aujourd’hui au sujet de la famille.

-          D’où la nécessité d’écouter les personnes concernées pour saisir les réalités d’aujourd’hui.

-          En même temps emprunter le regard du Christ pour dire la beauté de la famille.

-         Entre la réalité et l’idéal, trouver des voies de renouvellement en particulier pour ceux qui ne sont pas mariés, les divorces, les enfants naturels, les enfants des rues, les familles monoparentales, les personnes homosexuelles où vérité et miséricorde convergent.

L’entre deux synodes est proposé à toutes les communautés chrétiennes pour faire mûrir la réflexion.

En terminant ce 1° synode le Pape dénonce plusieurs tentations :

-          Un raidissement hostile à tout changement.

-          Un angélisme destructeur où la miséricorde ne s’attaque pas aux causes du mal

-          Faire porter des fardeaux trop lourds pour les pécheurs et les faibles.

-          Oublier la croix à porter dans la lutte contre le mal

-          Se prendre pour les propriétaires du dépôt de la foi et ne pas voir la réalité.

 

QUESTIONS QUI NOUS CONCERNENT DAVANTAGE

  1. Comment améliorer l’éducation affective des jeunes ?
  2. Comment améliorer la préparation au mariage et le sens de l’engagement ?
  3. Comment mieux accompagner les couples dura             nt les années du début de la vie commune ?
  4. Comment mieux accueillir dans les communautés les personnes blessées par des échecs familiaux ?

Mgr Daniel LABILLE
Evêque émérite

 

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