Ils vont leur chemin, Seigneur, ces garçons et filles, comme tes disciples vers Emmaüs.
Tu m’as mis sur leur route.
Donne-moi de les rejoindre comme tu m’as rejoint dans mon histoire,
respectant les méandres, les déviances de ma vie.
Apprends-moi non seulement à les voir, mais à les regarder.
Ces visages chiffonnés, lisses, ou ceux dont le sourire dit le cœur.
Ces yeux vides, fuyants, ou ce regard pétillant d’étoiles.
Que le soir, je rentre à la maison,
lourd d’emporter avec moi tous ces visages, tous ces regards.
Apprends-moi, Seigneur, à rejoindre ton désir sur eux
en embrassant toute l’étendue de leurs propres désirs.
À ne pas me figer sur ce qu’ils sont, mais à me fixer sur ce qu’ils ne sont pas encore.
Comme toi avec tes deux disciples, donne-moi de les aider à apprendre
que l’essentiel est de goûter les choses intérieurement.
Apprends-moi envers eux, Seigneur, l’infinie patience que tu nous portes.
À être l’agriculteur qui respecte leur terreau et les délais de leurs moissons.
Quand il m’arrive de les voir comme des puits comblés et desséchés,
aide-moi alors, Seigneur, à soulever pierre à pierre
pour dévoiler ce qui était caché à leurs propres yeux.
À être le sourcier de l’eau vive qui dort en eux.
Que je puisse leur dire, comme toi si souvent : « Lève-toi et marche ».
Que je puisse les inviter à incliner leur cœur vers cet Autre qui les habite déjà.
Jacques Maréchal (Extrait de la revue Prier n° 244 - Sept. 2002)