Imprimer cette page

les catcheurs (côté ring et côté vestiaire)

22 septembre 2014 By

ou : combat de coqs (à cause des prises de bec) et grosse frime du "rebeau" (masculin de rebelle J) de la classe et de la prof' de séfran, devant le public de Seconde ébaubi !  

 

          Cela va faire la 4ème fois que le nommé Alan (que j'appelle parfois "Alain", vraiment sans le faire exprès... et qui réagit immanquablement sur un ton outré, comme si je l'avais insulté « C'est ALANNE, M'dame ! »et moi nous donnons en spectacle à la classe assez gentille et amorphe de Seconde. Il ne peut visiblement pas supporter la moindre remarque de ma part, concernant ce qu'il fait (« Alan, j'avais demandé qu'on fasse comme ceci, et non comme cela ») ; ou le ton sur lequel il répond (« Alan, il faut s'adresser au professeur de façon courtoise, polie...») ; ou les droits qu'il s'arroge sans respect des règles basiques de vie de classe (à 37 : 36 élèves + 1 prof) : « Alan, vous avez pris la parole tout seul et sans lever le doigt / vous m'avez interrompue...». A chaque fois que je le reprends, il réagit toujours ("sur-réagit", devrais-je dire) de façon agressive, pour avoir le dernier mot et me "clouer le bec" (je fais part de mon ressenti).

2 coqs

 

            J'ai tenté à deux reprises de lui parler calmement après le cours, cela ne donne chez lui que déni (« c'est pas vrai ... Là, j'avais rien fait »), mise en accusation (« c'est vous qui me cherchez ... Y'a qu'avec vous que j'ai des problèmes » - Moi itou, ai-je failli lui rétorquer... De plus, mes collègues des autres matières l'ont aussi déjà repéré, à cause de son attitude) ou fausse ingénuité (« non, je comprends pas du tout où est le problème... Oh, c'est juste pour ça que vous vous fâchez ? »). Donc cela ne servait à rien. 

            Au bout de 2 semaines et ½ de cours, de 3 mots de ma part sur le Carnet (pour insolences, ou ton inapproprié avec un professeur, mais aussi livre oublié, travail pas fait...), et de 2 exclusions de cours, ma collègue Sophie, CPE, téléphone directement à la maman, laquelle décide de venir au lycée dans la journée. Sophie me prévient entre deux portes à midi : « la mère d'Alan vient ce soir à 16h30, tu peux être là ? » Et comment ! Plutôt deux fois qu'une !

            Nous voilà donc tous les 4 dans le petit bureau de la CPE, l'élève, sa mère, la CPE, et moi, la prof-intransigeante-qui-ne-supporte-rien. Au début, même numéro d'Alan que lorsque j'ai tenté de discuter en tête à tête (voir § 2) : 

combat

 

     Mais la mère me soutient : on ne s'adresse pas comme cela à un professeur ; et pour les "oublis", (de livre, de travail), Alan est en tort. Puis la CPE se met à le faire parler de lui, de son année de 3ème : Alan reconnaît qu'il avait le même genre de problème au collège, et souligne qu'il s'est calmé et a fait des progrès (– Hé bin, qu'est-ce que ça devait être, pensé-je !) ; elle demande comment ça se passe au club de sport (fan de basket, Alan y passe des heures, a un bon niveau en compète) : tout aussi franchement, il dit que ses équipiers, qui sont de bons amis, l'aident à prendre sur lui, sinon il se fait facilement virer du terrain par l'arbitre, car trop éruptif, colérique, violent (en paroles seulement). Et à la maison ? Alan fond en larmes, la mère est elle aussi visiblement émue : l'ambiance y est difficile, car le père d'Alan et son fils ont le même caractère, donc les accrochages sont fréquents... « Je ne sais même pas s'il m'aime  » souffle Alan entre deux sanglots.

            Muette depuis un moment, me voilà aussi émue : je commence à comprendre que ce garçon ne cherche pas à me défier à chaque cours, que son agressivité n'est pas (forcément) dirigée contre moi, et qu'il faut que j'essaie de l'aider à ne pas "exploser", tout en ne lui permettant pas non plus n'importe quoi à mon égard. Je le lui dis, en souriant ; je lui explique aussi que, devant les 35 autres, c'est comme dans un match (on n'est pas à l'entraînement ou dans les vestiaires, c'est "public") je ne peux pas accepter n'importe quel propos, ou n'importe quel ton de sa part ; il doit respecter les règles ; il en convient. Donc, lui dis-je, je vais me montrer la plus compréhensive possible, l'encourager à se dominer, tout en mettant quand même des limites et des barrières. Je ne sais pas très bien comment je vais faire, ajouté-je, mais je vais essayer. Et je passe l'éponge sur tout ce qui s'est passé jusqu'ici : aucune sanction, on prend un nouveau départ, mais j'ai besoin de son aide pour réussir. Il accepte, s'engage à faire de son mieux, s'excuse pour son comportement antérieur...

            Comme deux catcheurs qui avaient "tout donné" sur le ring devant le public, mais qui papotent calmement dans les vestiaires " écouter (et voir) "les catcheurs" par les Frères Jacques : (document INA) ]   nous avons quitté le petit bureau de la CPE en nous serrant la main, avons ri et plaisanté vers la fin ; il m'a dit merci, je lui ai dit merci aussi pour ses excuses... J'ai eu l'impression que chacun a sincèrement essayé de s'expliquer et de comprendre l'autre. Je ne sais pas si tout cela tiendra, ni ce que cela donnera. En tout cas, cela n'avait pas l'air d'être de la comédie de sa part, il m'a touchée. Voilà, c'était samedi, je le revois demain, à nous de transformer le match de catch en "tandem" où chacun aide l'autre.

prière

            Seigneur !? Un coup de pouce de ta part quand je flancherai ou manquerai de patience sera le bienvenu ! N'oublie pas que c'est toi mon coach !! 

 

Éléments similaires (par tag)

Connectez-vous pour commenter