et ce soir, la triste tonalité de la journée a perduré jusque dans notre réunion. Je crois que je retiens deux mots : "absurdité" et "abandon". Absurdité de notre institution et de certains hommes ou femmes qui la représentent, abandon d'êtres humains en danger, épuisés, ébranlés : les enfants qui nous sont confiés mais aussi leurs enseignants.
Pour ces derniers aujourd'hui, l'absurdité était de leur demander de se tenir debout et de faire bloc face à la barbarie, de jouer leur rôle d'adultes face à des enfants angoissés alors que ces mêmes enseignants sont des cibles et qu'ils ont peur.
L'abandon, c'est celui de l'institution qui refermera très vite la page des hommages, oubliera ses héros pour leur demander de nouveau d'être dans des injonctions contradictoires, sous pression, sur tous les fronts, et de mettre des rustines sur les maux d'une société qui va très mal.
"L’école fait son travail mais elle est la victime d’actes dont le contrôle lui échappe complètement. Elle est comme toujours le foyer de résonance tragique des tensions qu’on laisse se développer dans la société."
Nous n'avons finalement pas réfléchi ce soir au livre Grandir en humanité mais voici ce qu'Abdennour Bidar disait dans une interview aujourd'hui. Ce grand monsieur (je suis assez fan - je vous le concède) est inspecteur de l'Education nationale.
Pour moi, il est un signe d'espérance. Il exprime ainsi ce que nous nous sommes dits ce soir, signe que toute l'institution ne nous a pas abandonné.
Plus loin dans cette interview, il dit : "La menace de ces tragédies, c’est aussi de nous arracher notre humanité en détruisant la confiance qu’on a en elle. Je prends moi-même le temps de la respiration pour gagner en lucidité. C’est un énorme effort, mais construire en permanence ce discernement est une question de survie."
Notre respiration ce soir a été une prière plus longue que d'habitude au cours de laquelle Olivier a si bien fait la synthèse de nos discussions (j'aurais dû prendre des notes pour cette petite note tardive) et confié au Seigneur toute notre fatigue.
Enfin, si l'on parle aujourd'hui de la crise des vocations au sujet de l'enseignement, les tragédies que nous vivons ne risquent pas d'attirer les foules.
Mais méditons cependant cette citation de Tertullien, évoquée par Olivier en fin de soirée : "Le sang des martyrs est semence de Chrétiens".
Marianne (equipe d'Asnieres, Hauts de Seine)
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