7437D0CC AA1A 4DAA 81D9 54A4B898DB911Le temps est déja à la préparation de l'été, avec les premières annonces de nos sessions à déstination de tous!

dimanche, 01 décembre 2013 21:45

A Marseille, des enfants Roms à l'école...

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Des équipiers CdEP engagés, avec des partenaires, auprès des Roms.

 

Actuellement sur l’agglomération marseillaise, il y a une trentaine de squats, un seul lieu étant reconnu par la Préfecture : la bastide de Fontainieu, dans le quartier Saint-Joseph.

A Marseille, des familles Roms sont expulsées de quartiers en quartiers depuis 2010. Des liens avec des marseillais commençaient à se tisser. En février 2012, Mgr Pontier, archevêque de Marseille, « offrait » un logement à quelques-unes de ces familles dans les locaux d’une ancienne école paroissiale ; ces familles ont été obligées de quitter ce logement en Juillet 2013 pour cause de travaux.

En octobre 2012, il y a eu la démarche de Paul Daniel, prêtre responsable de la Pastorale des Migrants et de la Mission Ouvrière, qui a abrité dans les locaux de sa paroisse de la Belle de Mai plusieurs familles un soir de grand vent froid.  Pour donner suite à cet accueil provisoire, le collectif marseillais de solidarité avec les Roms a pris l’initiative de réquisitionner, en partenariat avec la communauté Emmaüs de St-Marcel une gendarmerie désaffectée du Bld de Plombières, bâtiment abandonné sans eau, ni toilettes, ni électricité pour y loger deux cents personnes.

La vie là- bas s’est peu à peu organisée. Des réunions hebdomadaires se sont tenues avec les familles qui, progressivement, ont pris leur place dans la gestion du lieu. Très vite, une des premières mesures a été de « permettre » la scolarisation des enfants dans les écoles publiques du secteur. Deux personnes se sont plus particulièrement attelées à cette tâche avec détermination et succès. L’Education Nationale (les Inspecteurs en particulier) a facilité cette démarche d’accueil des enfants.

Après une nouvelle expulsion (juillet 2013) et des évènements difficiles (rejet, agressions…) dans un autre lieu, les familles occupent aujourd’hui un terrain privé (encore une fois sans eau, ni toilettes, ni électricité) du Bld de Plombières sur lequel elles construisent des cabanes de fortune.

Un peu de positif : les enfants peuvent retourner dans les mêmes écoles…

L’histoire de la bastide de Fontainieu sera retracée un peu plus loin.

Michèle Bourguignon, le 18/11/2013

 

Témoignages :

Jean Kayser, équipier marseillais de CdEP, engagé avec d’autres dans l’accompagnement des familles Roms, a interviewé Jane B. et Bernadette O., deux bénévoles au contact de ces familles Roms.

Jean Kayser : Jane, Les réalités d’école ont une place importante dans votre vécu de solidarité. Comment s’est posée et se pose la question de la scolarisation des enfants ? Qui la souhaite ? Pourquoi, comment, à quelles conditions ?

Jane B. : Dès les premiers jours qui ont suivi la réquisition de l’ancienne caserne du Bd de Plombières, en novembre 2012, la question de la scolarisation s’est posée et nous avons commencé les démarches dans ce sens. Ce qui nous a tenu à cœur dès le début, c’était de ne pas faire de la « sous-école » sur place pour les enfants mais une véritable scolarisation. Il s’agissait de faire accueillir ces enfants, qui vivent en France, par l’école de la République qui a le devoir d’ouvrir ses portes à tous les enfants, quelle que soit leur origine, quelles que soient leurs conditions de vie.

Les parents sont désireux et impatients de voir leurs enfants prendre le chemin de l’école, comme tous les autres enfants.

Je pense que nous avons eu la chance de rencontrer un Inspecteur d’Académie très humain, convaincu de son devoir de citoyen et n’hésitant pas à tout mettre en œuvre pour faire respecter la Loi qui veut qu’en France, tous les enfants soient scolarisés.

Le combat pour la gratuité de la cantine, condition indispensable pour l’assiduité et qui permet aux enfants de manger au moins une fois par jour, fut plus difficile mais nous l’avons obtenue pour tous les enfants.

J.K. : Que retires-tu de cette expérience ? Qu’as-tu envie de transmettre ?

J.B. : En septembre 2013, beaucoup d’enfants Roms, vivant dans le quartier de Plombières (l’expulsion de la caserne a eu lieu en juillet), ont commencé leur deuxième année scolaire. Pour d’autres, qui viennent d’arriver en France ou qui n’avaient pas pu aller à l’école l’année dernière, c’est le début.

La joie qui se lit sur les visages de ces enfants lorsqu’ils apprennent qu’ils ont une place à l’école m’émeut chaque fois. Ils s’attachent très vite à leur école et à leurs enseignants. Ils prennent grand soin de leur matériel scolaire et très rapidement, l’école devient le seul élément de stabilité pour ces enfants.

Les enseignants font un travail remarquable, ils s’attachent eux aussi très vite à ces enfants. Un enseignant m’a confié, en fin d’année dernière, avoir beaucoup appris sur lui-même avec l’arrivée dans sa classe de trois enfants roms. Et selon une directrice d’école maternelle, la présence de ces enfants représente une vraie richesse pour l’école.

Malgré les expulsions à répétition, malgré les conditions de vie extrêmement dures que, bien souvent, nous peinons à imaginer (pas de maison, pas d’eau, pas d’électricité, pas de ramassage d’ordures, etc.), les parents accompagnent leurs enfants à l’école chaque jour. Avec fierté. Avec le sentiment, à ce niveau-là au moins, d’être un peu comme tout le monde. J’ai un respect et une admiration profonde pour le combat de ces parents.


Bernadette O., habitante du quartier Saint-Joseph, témoigne de la vie des Roms à la bastide de Fontainieu et dans son quartier : «  les familles roms ont elles-mêmes squatté les lieux, après des expériences de rejet violent en septembre 2012 dans une cité des quartiers Nord de Marseille. A St Joseph, il y avait un début de nouveau rejet par certains habitants, rejet attisé et exploité par des formations politiques. Des travailleurs sociaux de l’ADDAP sont intervenus. A l’initiative du CCFD, des personnes du quartier ont constitué un groupe de solidarité pour créer des liens et animer, toute l’année, des ateliers de préscolarisation. Enfin l’ADDAP a été reconnue par la Préfecture comme responsable du site. En 2012-2013, des enfants ont été progressivement scolarisés. Ils sont maintenant une quinzaine en école ou au collège. Une aide aux devoirs démarre cette année (2013-2014) ».

Jean Kayser : Bernadette, qu’est-ce qui te paraît le plus important pour les conditions de réussite de la scolarisation des enfants roms ?

Bernadette O. : La stabilité du lieu de scolarisation et du lieu de vie !

Comme si la grande précarité des lieux de vie ne suffisait pas, la scolarisation et les apprentissages sont remis en question à chaque expulsion. Il faut vivre ces rejets successifs et se refaire une place. Quand il y en a une !

Les enfants sont fortement motivés pour aller à l’école, pour apprendre, et les parents pour les accompagner régulièrement malgré des conditions de vie très difficiles. La motivation des familles est apparue progressivement.

Pour les inscriptions ce fut, l’année dernière, difficile, d'obtenir aussi le repas à la cantine. C’est souvent, pour les enfants, le seul vrai repas de la journée. Une expulsion vient tout remettre en cause !

La place de ces enfants est à l’école. Que fait-on de la scolarité obligatoire à partir de 6 ans? Sans scolarité, c’est une double exclusion : la précarité extrême et l’impossibilité d'accéder au savoir comme tous les enfants de France.

Au delà des rejets, il y a la difficulté de la langue, les absences (maladies ou autres), la reprise, les fugues, le manque de matériel, de vêtements, de nourriture, mais aussi les sourires, la joie de vivre, d’accueillir. Nous avons dû chaque fois rechercher ce qui pourrait être fait.

Point fort pour cette scolarisation : le monde enseignant et sa capacité de contacts humains ; des inspecteurs aux enseignants, en passant par les directeurs pour beaucoup convaincus de leur devoir de citoyen d’accueillir tout enfant en âge de scolarisation.

Point fort aussi, l’action de bénévoles en lien avec un centre social qui nous prête un local pour aider ces enfants à compenser les retards, les insuffisances dans les apprentissages et apprendre dans le calme, la propreté, la chaleur, écrire avec de la lumière... et aller aux toilettes !

Autre nécessité aussi : Etre référent, par des contacts réguliers, auprès des enseignants et des parents dans les démarches administratives.

J.K. : Que veux-tu tirer et retransmettre de cette expérience ? 

B.O. : Il y a un an, je ne connaissais rien de cette communauté Rom et maintenant sur le site, dans le quartier, dans le bus et par téléphone nous sommes en contact. Cela a commencé par les ateliers menés avec les enfants. Maintenant les adultes ont confiance, il y a un lien qui s’est créé dans le respect mutuel.

Donner à ces enfants une chance de pouvoir un jour choisir leur chemin de vie, tout en restant Roms, en ayant la possibilité de devenir autonomes par leur travail et d'exister dans des conditions décentes. Je viens de lire le témoignage d’Anina : « Je suis Tzigane et je le reste : des camps de réfugiés roms à la Sorbonne. » (Ed : City), et je pense que beaucoup de ces enfants Roms à Marseille ont la possibilité eux aussi de s’en sortir comme cette jeune femme de 22 ans qui veut s’engager dans la magistrature pour aider les siens. Elle nous aide aussi à comprendre pourquoi ces personnes ont dû fuir la Roumanie.

Cette expérience est très importante sur le plan humain, très enrichissante ; les échanges se font toujours avec beaucoup de respect, de dignité. La grande famille (du grand-père à l’enfant) a beaucoup d’importance.

Trouvons une solution d’accueil qui permette la stabilité, et ces enfants seront avides d’apprendre et de réaliser.
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